Les dessous du droit

Etrangement le cabinet d’avocats suisse Monfrini Crettol et Associés jouit d’une bonne réputation à Genève. Pourtant, l’étude a été impliquée dans deux affaires majeures de ces cinq dernières années : les Offshore Leaks et les Panama Papers. Comment est-il possible de se faire le chantre de la justice et de violer la loi ?  

Sur son site Internet ce cabinet suisse se vante de son excellente réputation et se dit déterminé à la maintenir tout en donnant la plus « haute priorité à ses clients ». Il oublie néanmoins de mentionner les ennuis qu’il a collectionnés depuis les Offshore Leaks en 2013  et ceux des Panama Papers au début de l’année 2016. C’est de bonne guerre… En revanche, compte tenu des affaires dans lesquelles il a été impliqué, il n’était peut-être pas utile de rappeler qu’il agissait « dans le strict respect des règles d’éthique applicables à la profession d’avocat à Genève. » Pour un avocat, l’éthique ne commence-t-elle pas par le respect de la loi ?

Le tropisme des paradis… fiscaux !
Enrico Monfrini et Albert Rey-Mermet partagent le même attrait pour le Panama. Lorsque l’affaire des Offshore leaks éclate, elle révèle que le premier a créé presque 200 sociétés domiciliées dans ce pays et le deuxième - trois. Enrico Monfrini est un avocat star qui défend des causes très médiatiques et est spécialisé dans le recouvrement des fortunes cachées des anciens Présidents, de Duvalier en Haïti, en passant par le Nigéria avec Sani Abacha, jusqu’à Ben Ali en Tunisie. Les avoirs de ces ex-chefs d’Etats sont le plus souvent dissimulés dans des sociétés immatriculées dans des paradis fiscaux. Au nom de la morale, de la justice et de la loi, Enrico Monfrini court le monde pour redonner aux pauvres, l’argent volé par les riches. L’entreprise est noble. Lorsqu’en 2013, le monde apprend qu’il a créé 178 sociétés, au Panama et aux îles Vierges Britanniques, spécialisées dans la fraude fiscale, la dissimulation et le blanchiment  la surprise est de taille ! Albert Rey-Mermet, lui, a joué plus petit, seulement trois sociétés à son actif, mais ce ne sont pas n’importe lesquelles. En effet, pour les créer il s’est allié avec un cabinet d’avocats panaméen, Fabrega, Molino & Mulino, à la réputation sulfureuse, il est pris dans les filets de nombreux scandales de corruption.

Panama Papers
Pour sauver leur réputation, leur honneur et l’éthique de leur cabinet, il eut été logique, qu’après un tel scandale Enrico Monfrini et Albert Rey-Mermet réagissent et clôturent leurs comptes domiciliés dans des paradis fiscaux. Or, la nouvelle affaire des Panama Papers prouve qu’il n’en a rien été .  En effet, trois ans plus tard, les listes publiées par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) montrent qu’Enrico Monfrini et son étude administrent encore des centaines de sociétés dans des paradis fiscaux . Au Nigéria, cette nouvelle n’est pas passée inaperçue. Le journal nigérian Today du 7 avril 2016 note : « la révélation souligne l'hypocrisie d'un homme largement vénéré pour sa remarquable capacité à démanteler les fraudeurs fiscaux et les pillards entre les administrations.  » Quant à Albert Rey-Mermet après 2013, il a fait le ménage, mais pas complètement, sur les trois sociétés dont il était administrateur, il en a fermé seulement deux. A-t-il gardé active Palmer Estates Inc pour des questions d’éthique ?!  A n’en pas douter, l’excellente réputation de Monfrini et Associés est durablement entachée par ces affaires, qui ne sont, d’ailleurs, peut-être pas terminées…

 

Liens et références utiles:

  https://offshoreleaks.icij.org/nodes/11013425
  http://www.premiumtimesng.com/news/headlines/201310-panamapapers-lawyer-hired-by-nigeria-to-track-abacha-loot-has-178-firms-in-tax-havens.html
  https://offshoreleaks.icij.org/nodes/11013425
  https://offshoreleaks.icij.org/nodes/11013425
  https://www.today.ng/news/national/103048/nigerian-public-officers-names-panama-papers-may-face-prosecution